Entre ailleurs et nulle part : la fiction de l'enclavement touristique - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2009

Entre ailleurs et nulle part : la fiction de l'enclavement touristique

Résumé

L'activité touristique s'est étendue à de nombreux lieux sur Terre et même à des espaces qui font figure de marges (polaires, par exemple). On peut ainsi considérer qu'il n'y a plus véritablement de lieu intouché par le tourisme. Dans ce contexte, l'enclavement touristique peut être vu comme un procédé qui permet d'échapper à la finitude (touristique) du monde. Les enclaves touristiques sont des lieux artificiels proposant hébergement, restauration et loisirs, qui se distinguent également par leur mise en scène, cherchant à répondre aux imaginaires touristiques, aux représentations fantasmées. Les brochures des voyagistes en témoignent, notamment lorsque l'on considère les enclaves en milieu insulaire et/ou tropical : Polynésie, Antilles, archipels de l'Océan Indien par exemple. Ce type de documentation joue sur des images – mer turquoise et limpide, plage de sable blanc, palmiers – et des valeurs stéréotypées empruntant par exemple au mythe du Bon Sauvage, de l'Age d'Or, à l'Etat de Nature ou à des représentations de type édénique : luxuriance, vie nonchalante, sensualisme voire sensualité... Par cette mise en scène, cette fiction, les enclaves touristiques se détachent d'une identité locale ou régionale pour se rapprocher d'une forme d'utopie. De fait, les enclaves touristiques fonctionnent sur le registre du décalage, de la discontinuité (voire de la ségrégation spatiale) en premier lieu avec le territoire d'accueil, de « support ». L'enclavement joue comme un contrepoids vis-à-vis de l'altérité. Il peut la minorer, la rendre acceptable : c'est tout l'intérêt de la fermeture des enclaves touristiques, des services standardisés et complets qui font que l'enclave se suffit à elle-même et tend à combler les attentes des touristes. A contrario, lorsque la destination ne semble pas assez « dépaysante », a perdu son exotisme, on peut recréer par le biais de l'enclavement une altérité rêvée, fantasmée que l'on met en scène : on pense ainsi à des prestations comme des « danses traditionnelles », la présentation de savoir-faire locaux... Par cette fiction à laquelle participe (volontairement ?) le touriste, l'enclave rejoue un « paradis perdu » décontextualisé qui emprunte aussi bien aux exigences contemporaines en termes de confort, de sécurité, à une authenticité (véritable ou non) tropicale, insulaire. Les référents géographiques sont également flous : on cherchera par exemple à mettre en place une ambiance caribéenne, polynésienne en s'appuyant sur ce que l'on suppose être les représentations du touriste plutôt que d'essayer de lui faire découvrir, entrevoir des lieux relevant moins de la mythification. En ce qu'elles brouillent des repères géographiques précis pour privilégier des représentations diffuses, on peut voir les structures enclavées comme des applications touristiques de l'utopie.

Domaines

Géographie
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

halshs-00483021 , version 1 (12-05-2010)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00483021 , version 1

Citer

Bénédicte Auvray. Entre ailleurs et nulle part : la fiction de l'enclavement touristique. Fins et confins du tourisme, May 2009, Grenoble, France. ⟨halshs-00483021⟩
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