Bourdieu et Wittgenstein : contributions à une critique de la vision scolastique - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Article Dans Une Revue Europe. Revue littéraire mensuelle Année : 2004

Bourdieu et Wittgenstein : contributions à une critique de la vision scolastique

Résumé

Pierre Bourdieu ne se voulait pas philosophe – seulement sociologue ou anthropologue, c'est-à-dire scientifique. Il en est toutefois venu à la fin de son œuvre à exposer les principes théoriques, et donc épistémologiques, sinon philosophiques, qui guidaient son travail. Dans un ouvrage tardif, Méditations pascaliennes, il revendique un héritage pascalien plus que marxien, et semble ne citer Wittgenstein qu'en passant. Pourtant ce dernier intervient de façon constante sur des points fondamentaux depuis le début de l'œuvre. Nombre de commentateurs ne s'y sont d'ailleurs pas trompés qui ont déjà analysé le rapport de certains pans de l'œuvre de P. Bourdieu avec la philosophie de Wittgenstein .
Mais l'affinité la plus grande de Bourdieu avec Wittgenstein ne réside peut-être pas tant dans des points théoriques particuliers – même s'il existe bien des convergences frappantes, des adaptations à la théorie sociologique de réflexions philosophiques – que dans une posture théorique, voire épistémologique, que Pierre Bourdieu retiendrait de la philosophie du second Wittgenstein. Du moins est-ce l'hypothèse de lecture que nous essayons de défendre ici, qui n'ignore pas les modifications profondes que peut faire subir le travail empirique de Bourdieu à une posture théorique qu'il a pu emprunter à Wittgenstein, ni même les éventuelles avancées théoriques que cela a pu lui permettre d'accomplir. On ne prétend donc pas que Bourdieu est fidèle à la pensée wittgensteinienne ou qu'il établit une sociologie wittgensteinienne (chose qui pourrait bien être une contradiction dans les termes). Il s'agit simplement de voir ici dans quelle mesure une certaine position épistémologique qui guide sa pratique de scientifique hérite de la philosophie wittgensteinienne.
L'hypothèse qui était faite ici voulait que ce qui détermine la posture scientifique de l'œuvre de P. Bourdieu et que ce qu'il retient comme principe épistémologique à partir de la philosophie développée par le second Wittgenstein, c'est une défiance absolue à l'égard de la théorie pure, ou, comme Bourdieu dit en reprenant l'expression à J.L. Austin, une critique de la vision scolastique. Cette rupture avec une vision intellectualiste marque sa démarche et presque tous ses points théoriques, aussi bien son attention portée à la pratique et la théorisation qu'il en fait, que la dénonciation des illusions de la raison épistémocentrée, ou la théorie de l'habitus. On pourrait résumer ce principe unificateur, qui vaut aussi bien pour Bourdieu que pour Wittgenstein, comme Erklärung de l'Erklärung : une critique de l'activité critique par excellence qu'est la philosophie, ou la théorie pure, qui ne s'interroge pas, ou pas assez lucidement, sur ses propres aveuglements.
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Citer

Bruno Ambroise. Bourdieu et Wittgenstein : contributions à une critique de la vision scolastique. Europe. Revue littéraire mensuelle, 2004, 906, pp.258-271. ⟨halshs-00338158⟩
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