Le non-recours aux soins des actifs précaires - HAL-SHS - Sciences de l'Homme et de la Société Accéder directement au contenu
Autre Publication Scientifique Année : 2007

Le non-recours aux soins des actifs précaires

Résumé

L'objectif général de cette recherche est de développer une analyse quantitative et qualitative du non-recours aux soins des actifs précaires.
L'interrogation principale porte sur les relations entre ‘absences de suivi médical' ou ‘renoncements aux soins', et cumul de précarités d'emploi, de revenus, dans le travail, de revenus, de protection sociale.
A sein de la population prise en compte (consultants des Centres d'examens de santé âgés de l'Assurance maladie de 16 à 59 ans, soit 1 427 431 personnes), 6 populations d'actifs précaires pourront être étudiées au regard du « non-recours aux soins » :
 Les personnes au chômage depuis plus d'1 an.
 Les jeunes de 16-25 ans en insertion.
 Les allocataires du RMI/CMU.
 Les personnes occupant un emploi « non stable » ou un emploi « stable à temps partiel ».
 Les personnes occupant un emploi stable à temps plein parmi les personnes de 16 à 59 ans qui déclarent rencontrer dans le mois de réelles difficultés financières.
 Les personnes travaillant et les chômeurs depuis moins d'1 an parmi les consultants actifs présentant un risque de fragilité sociale selon le score « Evaluation de la précarité et des inégalités de santé dans les Centres d'examens de santé » (EPICES)
Au sein de chacune de ces populations, des sous populations sont analysées. Elles sont définies en faisant appel à des données individuelles et à des données géographiques (ou écologiques).

Synthèse des résultats pour les chômeurs de plus d'1 an :

- La comparaison entre les trois variables prises en compte pour identifier le non-recours aux soins (visite chez le médecin, visite chez le dentiste, suivi gynécologique) apporte des premiers éléments de discussion. Tout d'abord elle met en avant un non-recours au dentiste plus fréquent que le non-recours au médecin, aussi bien chez les hommes que chez les femmes, quels que soient l'âge, la catégorie socio-économique et la santé des personnes. L'examen des variables explicatives renvoie pour beaucoup aux ressources économiques pour expliquer ce plus fort non-recours au dentiste qu'au médecin. Les coûts des traitements et le niveau de prise en charge par les assurances complémentaires ont souvent été mis en avant dans ce cas pour expliquer des retards ou des renoncements aux soins. Nos résultats le confirment.

- Une différence apparaît entre les hommes et les femmes, dans la mesure où pour les femmes, les variables explicatives attachées exclusivement à l'un ou l'autre non-recours (au médecin ou au dentiste), sont toutes ou en partie d'ordre socioéconomique, alors que ce n'est pas du tout le cas pour les hommes en ce qui concerne le non-recours au médecin (variables strictement médicales). On peut également remarquer que chez les hommes, les indicateurs les plus déterminants du non-recours aux soins sont les mêmes pour le médecin et le dentiste, alors que chez les femmes, plus que chez les hommes, le non-recours au dentiste est davantage lié à des indicateurs de santé. Autrement dit, l'explication du non-recours varie entre les hommes et les femmes. Cependant, pour affirmer si ce phénomène est le résultat de logiques différentes selon le genre (et pour dire par conséquent s'il s'agit d'un « phénomène de genre »), nous devrons retrouver des différences (sinon ces différences) entre hommes et femmes pour chacune des cinq autres populations, afin de dégager un système d'explications récurrentes.

- L'influence des variables économiques (des ressources financières principalement) soulignée plus haut se lit également au niveau des indicateurs qui sont communs aux hommes et aux femmes. Sur ce plan, que ce soit pour le non-recours au médecin ou le non-recours au dentiste, les variables qui pèsent le plus sont l'absence de complémentaire santé, être bénéficiaire de la CMU ou d'une autre aide, le chômage de longue durée, et, sur le plan médical, la présence de caries et le déficit visuel. Pour les hommes comme pour les femmes, les autres déterminants sociologiques du non-recours au médecin sont la vie en couple (surtout pour les hommes) et dans une moindre mesure le niveau d'études, et ceux du non-recours au dentiste sont la PCS et une nouvelle fois les problèmes financiers.

- De tout cela, retenons que vivre en couple « protègerait » davantage du non-recours. Comme d'autres travaux l'ont montré, français ou anglo-saxons consacrés à la protection sociale, les personnes vivant seules sont en effet plus exposées au non-recours, surtout lorsque leur niveau d'études est peu élevé. En l'occurrence, ce sont surtout des hommes plutôt jeunes qui sont généralement dans ce cas et qui subissent ainsi les effets d'une désocialisation plus forte. De ce point de vue, la recherche apporte une nouvelle fois la confirmation que le non-recours est un phénomène social situé, c'est-à-dire renvoyant à un système d'explications donné, que l'analyse statistique multivariée d'une part, et les enquêtes qualitatives d'autre part, auront à expliciter.

- Sur le plan médical maintenant, certaines variables paraissent avoir une influence (taux de cholestérol, tension artérielle, ...). Une probable explication est à rechercher en particulier du côté des conditions de vie et des modes de consommation, mais pas seulement. En tout cas, du côté de la santé perçue un lien apparaît avec le non-recours aux soins, même si le sens de l'association est différent pour le non-recours au médecin et le non-recours au dentiste. Le premier est plus fréquent chez les personnes se sentant en bonne santé, alors que le second est plus fort chez les personnes se percevant en mauvaise santé.
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Origine : Fichiers produits par l'(les) auteur(s)

Dates et versions

halshs-00138936 , version 1 (28-03-2007)

Identifiants

  • HAL Id : halshs-00138936 , version 1

Citer

Philippe Warin, Catherine Chauveaud, Antoine Rode, Jean-Jacques Moulin, Carine Chatain, et al.. Le non-recours aux soins des actifs précaires : Rapport scientifique intermédiaire n°1 - pour l'ANR. 2007. ⟨halshs-00138936⟩
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