Victimes d'agresseurs anonymes : reconstitutions identificatoires
Résumé
Dans la commune d'Aulnay-sous Bois, où se passe l'enquête, les victimes ignorent tout de leur agresseur resté dans un parfait anonymat. Comme il leur est insupportable et incompréhensible de ne pas savoir qui a agi et pourquoi, ces victimes se livrent à tout un travail destiné sinon à identifier l'agresseur du moins à dévoiler sa personnalité.
Les cambriolés, lors de la remise en ordre de l'espace domestique profané, se livrent à une analyse sémiologique de toute trace laissée par les cambrioleurs. Le décryptage d'indices tels que pas, bouts de mégots aboutit à construire un portrait de l'agresseur. Ce travail d'élaboration sert en outre à évaluer la dangerosité de la foule des anonymes et à acquérir des savoirs sur cet Autre pour penser une réplique.
A partir des informations rassemblées (couleur de peau, manières d'agir), les victimes, assistées de leurs proches, s'attachent également, au cours de ce processus d'identification, à désigner l'Autre agresseur ; celui-ci peut d'ailleurs être collectif. L'indice fourni est enrichi en puisant dans un stock commun d'informations disponibles sur la place publique et alimenté par des récits stéréotypés, les média, les discours et les pratiques de la police. Chaque désignation nourrit ce stock où d'autres victimes et leurs proches puiseront à leur tour. Elle passe évidemment par une altérité présumée par la victime et fait l'objet d'une accusation. Elle engage simultanément la communauté des offensés et celle des offenseurs. Tout ce qui affecte celle-ci est perçu comme le juste retour des choses, et toute arrestation d'un individu présumé semblable laisse supposer qu'il s'agit du coupable.
Les cambriolés, lors de la remise en ordre de l'espace domestique profané, se livrent à une analyse sémiologique de toute trace laissée par les cambrioleurs. Le décryptage d'indices tels que pas, bouts de mégots aboutit à construire un portrait de l'agresseur. Ce travail d'élaboration sert en outre à évaluer la dangerosité de la foule des anonymes et à acquérir des savoirs sur cet Autre pour penser une réplique.
A partir des informations rassemblées (couleur de peau, manières d'agir), les victimes, assistées de leurs proches, s'attachent également, au cours de ce processus d'identification, à désigner l'Autre agresseur ; celui-ci peut d'ailleurs être collectif. L'indice fourni est enrichi en puisant dans un stock commun d'informations disponibles sur la place publique et alimenté par des récits stéréotypés, les média, les discours et les pratiques de la police. Chaque désignation nourrit ce stock où d'autres victimes et leurs proches puiseront à leur tour. Elle passe évidemment par une altérité présumée par la victime et fait l'objet d'une accusation. Elle engage simultanément la communauté des offensés et celle des offenseurs. Tout ce qui affecte celle-ci est perçu comme le juste retour des choses, et toute arrestation d'un individu présumé semblable laisse supposer qu'il s'agit du coupable.